Francophile et passionné de football, le discret Daniel Kretinsky vient de racheter une partie des activités d'Atos, le deuxième groupe informatique français. Un investissement de plus pour ce
milliardaire insatiable devenu en l'espace de cinq années une figure incontournable du capitalisme tricolore.
Le paysage économique de l'Hexagone l'inspire. Après les médias et la grande distribution, le milliardaire Daniel Kretinsky continue à investir tous azimuts en France. Cette fois, l'homme d'affaires a jeté son dévolu sur Atos, le deuxième groupe informatique français derrière Capgemini, dont les finances ont plongé dans le rouge vif ces deux dernières années.
La transaction, officialisée le 1er août pour un montant de 100 millions d'euros, permet au magnat tchèque de mettre la main sur Tech Foundations, la branche qui regroupe les activités de maintenance de l'infrastructure informatique d'Atos, comptant 52 000 employés à travers le monde.
Cette acquisition réalisée dans un secteur en panne, frappé de plein fouet par la concurrence du cloud, confirme le goût de Daniel Kretinsky pour les entreprises en difficulté et les investissements à contre-cycle, soit dans le creux d'un cycle économique.
"Il intervient dans des secteurs mal évalués par les marchés mais qui correspondent à des besoins durables, qui peuvent créer de la valeur. C'est un fin stratège et un excellent négociateur", assure son conseiller, le chef d'entreprise Denis Olivennes, interrogé par le journal Les Échos.
Un baron de l'énergie
Avec ce nouveau coup, le quadragénaire discret, réputé pour sa force de travail et son intelligence peu commune, réalise sa troisième acquisition majeure en l'espace de quelques semaines en France. En juin, il a pris le contrôle d'Editis, le deuxième groupe le plus important d'édition derrière Hachette, rassemblant plus de 40 marques dont Robert Laffont, Bordas, Nathan, Plon ou encore La Découverte.
Fin juillet, "un accord de principe" a été annoncé par le distributeur Casino, lourdement endetté, sur l'offre du milliardaire associé à l'homme d'affaires Marc Ladreit de Lacharrière et au fonds d'investissement Attestor. C'est la première fois qu'un repreneur étranger s'empare d'une enseigne française historique.
Daniel Kretinsky connaît déjà parfaitement le secteur de la distribution : il possède près de 50 % de l'Allemand Metro, est le second actionnaire du Britannique Sainsbury's et est récemment entré au capital de FNAC-Darty.
"En l'espace de quelques semaines, son implication dans le pays a pris une tout autre dimension, glisse au Figaro un patron du CAC 40. Il est passé de tête-à-tête avec Vincent Bolloré pour discuter des manuels scolaires d'Editis à des rendez-vous avec les plus hautes sphères de l'État autour de Casino et l'assiette des Français."
Il faut dire que cet avocat de formation âgé de 48 ans, fils d'une juge à la Cour constitutionnelle tchèque, est plus riche que jamais. Avec la guerre en Ukraine et la crise de l'énergie, la fortune de l'homme d'affaires, bâtie sur le gaz et le charbon à travers la holding tchèque EPH, a doublé en seulement un an, dépassant les 9,4 milliards de dollars, selon Forbes.
La France et le foot dans la peau
Mais pour le milliardaire, la France représente bien plus qu'une porte d'entrée privilégiée sur le marché européen dans un contexte post-Brexit. Le natif de Brno, en Moravie du Sud, la deuxième plus grande ville de République Tchèque, est un francophile et un francophone averti qui a effectué une partie de son cursus universitaire à Dijon.
Au printemps 2018, le magnat parvient à réunir ses deux passions : la France et la presse dans laquelle il a déjà investi dans son pays natal. Il commence par racheter l'hebdomadaire Marianne et le magazine Elle, puis entre au capital du groupe Le Monde. Daniel Kretinsky, qui défend "un engagement citoyen", a aussi renfloué le quotidien Libération à hauteur de 15 millions d'euros en septembre, sans pour autant entrer au capital. Foto-Arz, Wikimedia commons.