La succession de révélations de violences sexuelles subies par des enfants et des adolescents en marge de leur entraînement de patinage ou de judo, ont jeté en 2020 une lumière crue sur le
silence d'instances sportives désormais forcées de les regarder en face.
Bien sûr, il y avait déjà eu quelques cas, et même des procès, comme celui de l'entraîneur de tennis Régis de Camaret, condamné en appel à dix ans de prison pour avoir violé deux joueuses, près d'une vingtaine d'autres cas étant prescrits, dont celui d'Isabelle Demongeot.
Ancienne numéro deux du tennis français, celle-ci avait dénoncé avec force, des années après, des viols dans les vestiaires, le local à balles ou la chambre d'hôtel près de Roland-Garros.
Plus récemment, Andrew Geddes, ancien entraîneur de tennis en banlieue parisienne, a été condamné à 18 ans de prison pour des viols sur quatre anciennes élèves.
Oui, dans le milieu du sport, de jeunes filles mais aussi de jeunes garçons, ont subi des agressions sexuelles et des viols, entre deux entraînements, pendant un stage, en même temps qu'ils vivaient leur passion ou leur loisir.
Alors que la parole des victimes se libère, et semble être mieux entendue, dans le sillage du mouvement #Metoo, le patinage et le judo ont été sérieusement secoués en 2020.
Début janvier, Sarah Abitbol brise "un si long silence", titre de son livre. Cette championne de France de patinage artistique, multimédaillée, raconte comment elle a été violée par son entraîneur, Gilles Beyer, alors qu'elle avait entre 15 et 17 ans, au début des années 90.
Lui évoque "des relations intimes" et "inappropriées".
- "Omerta partagée" -
Le livre de Sarah Abitbol, qui n'a pas porté plainte pour cause de prescription, arrive peu après une grande enquête du collectif Disclose, mettant au jour des "dysfonctionnements majeurs" à tous les échelons, ayant fait au moins 276 victimes, en majorité des enfants de moins de 15 ans, et dans 28 disciplines différentes.
Sarah Abitbol n'est pas la seule, plusieurs autres patineuses accusent également leurs entraîneurs de viols et d'agressions sexuelles. En septembre, la justice a ouvert une enquête pour "viols" et "agressions sexuelles": plus d'une vingtaine d'entraîneurs seraient concernés.
L'affaire s'est doublée d'un bras de fer entre la ministre des Sports Roxana Maracineanu et Didier Gailhaguet, puissant patron de la Fédération française des sports de glace (FFSG), accroché à son siège, qui finira par démissionner.
Autre président mis en cause pour sa gestion de cas de violences sexuelles, Nicolas Belloir, à la tête de la Fédération française de roller et de skateboard (FFRS), qui a lui aussi démissionné.
Souvent, les instances sportives n'ont rien dit, n'ont pas voulu entendre, ont privilégié un entraîneur maltraitant, voire criminel, mais parfois aussi n'ont rien su.
Toutes les fédérations sont touchées, explique la ministre des Sports, qui a fait de ce sujet une des ses priorités et pointe un système qui "a fauté depuis trop longtemps à tous les étages" ainsi qu'une "omerta partagée".
- Contrôle d'honorabilité -
La cellule chargée de recenser les cas au ministère en est à 330 affaires.
"Des petites Abitbol, il y en a dans toutes les fédérations actuellement", explique Véronique Lebar, présidente du comité Ethique et Sport, qui aide des victimes.
En octobre, c'est le judo, sport très pratiqué en France, qui s'est retrouvé au tapis. afp
Plus d'une vingtaine de cas sont recensés. Le ministère a diligenté une inspection et le parquet de Lille a ouvert une enquête préliminaire visant un ex-membre du comité de direction fédérale, pour des agressions sexuelles sur trois victimes.