Une nouvelle tentative de cessez-le-feu a débuté, dimanche, au Soudan, conclue entre l’armée et les paramilitaires qui se livrent une guerre sans merci depuis mi-avril. Cette trêve doit durer
72 heures et permettre l'acheminement d'aide humanitaire dans tout le pays. Elle suscite néanmoins peu d’espoir, car les précédentes n’ont pas été respectées.
Alors que les combats se sont intensifiés samedi à Khartoum, faisant de nouvelles victimes civiles, l’armée et les paramilitaires, engagés depuis le 15 avril dans un conflit fratricide, ont accepté un cessez-le-feu de 72 heures, selon les médiateurs saoudiens et américains.
"Le royaume d'Arabie saoudite et les États-Unis annoncent l'accord des représentants des Forces armées soudanaises et des Forces de soutien rapide (FSR) pour un cessez-le-feu dans tout le Soudan pour une période de 72 heures à partir de dimanche", a indiqué un communiqué du ministère saoudien des Affaires étrangères.
Il s'agit d'une énième trêve, après de nombreuses autres qui n'ont quasiment pas été respectées. Le cessez-le-feu est entré en vigueur dimanche à 6 h locales (4 h GMT), selon la même source.
Outre l'arrêt de tout mouvement et d'attaque, les deux camps ont convenu d'autoriser l'acheminement de l'aide humanitaire dans tout le Soudan, selon le communiqué. L'annonce du cessez-le-feu intervient, alors que les combats font rage à Khartoum où des frappes aériennes et des explosions ont fait des morts parmi les civils.
Les combats opposant l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane aux paramilitaires des FSR, dirigés par le général Mohamed Hamdane Daglo, ont plongé ce pays d'Afrique de l'Est, l'un des plus pauvres au monde, dans une crise inextricable. Selon des témoins à Khartoum, les frappes aériennes se sont intensifiées ces deux derniers jours.
Pas de scénario de retour à la paix Les FSR, qui accusent l'armée de cibler spécifiquement des quartiers résidentiels, ont affirmé avoir abattu, samedi, un avion de chasse de l'armée. Sur une vidéo partagée par les paramilitaires sur Twitter samedi, on peut voir des maisons en briques détruites et des couvertures qui recouvrent ce qui semble être des cadavres.
"Les balles feront office de médiation" entre l'armée et les paramilitaires, a déclaré le général Yasser Atta, adjoint du chef de l'armée, dans une vidéo publiée vendredi. Malgré des tentatives de médiation menées notamment par Riyad et Washington, aucun scénario de retour à la paix n'est en vue.
Le ministère saoudien des Affaires étrangères a prévenu, samedi, dans son communiqué que "dans le cas où les parties ne respecteraient pas le cessez-le-feu de 72 heures, les facilitateurs seront contraints d'envisager de reporter les pourparlers de Jeddah" en Arabie saoudite où se sont tenues des négociations entre camps rivaux depuis plusieurs semaines.
Des tirs avec "divers types d'armes" ont également été signalés par des habitants du sud de Khartoum, tandis que dans la banlieue nord résonnent des "tirs de roquettes et d'artillerie lourde", ont affirmé des témoins à l'AFP.
Dans ce chaos, des quartiers entiers de la capitale sont privés d'eau potable et l'électricité ne fonctionne que quelques heures par semaine. Des bombardements d'artillerie lourde ont par ailleurs visé Khartoum Nord (Bahri) et des combats se sont produits dans la région d'Al-Shajara (sud) près d'une base militaire, ont rapporté des témoins.
La situation est tout aussi alarmante dans la région du Darfour, où "la violence fait rage", a alerté samedi l'ONG Médecins sans frontières (MSF). Les témoignages sur des violences de grande ampleur contre les civils s'y multiplient, et selon l'ONU, plus de 149 000 personnes ont fui vers le Tchad depuis le début des combats le 15 avril.
Rien que ces derniers jours, "6 000 personnes ont fui la ville d'El-Geneina" (Darfour-Ouest), pour trouver refuge dans la ville d'Adré au Tchad, a indiqué MSF samedi. "La situation est franchement accablante", affirme le Dr Seybou Diarra, coordinateur de MSF pour la région d'Adré.
Nouveau "désastre humanitaire" Déjà dévastée dans les années 2000 par une guerre civile particulièrement sanglante, cette vaste région de l'Ouest du Soudan se dirige vers un nouveau "désastre humanitaire", que le monde doit empêcher, a plaidé, jeudi, le responsable de l'ONU pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths. Foto- Christopher Michel from San Francisco, USA, Wikimedia commons.