La situation épidémique est "préoccupante" mais le gouvernement joue une dernière carte pour éviter un troisième confinement en renforçant plusieurs mesures de restriction, un choix
surprise qui ne fait pas l'unanimité.
Compte tenu des chiffres de l'épidémie qui se détériorent jour après jour, "la question d'un confinement se pose légitimement", a déclaré le Premier ministre vendredi soir lors d'une prise de parole inattendue à l'issue d'un Conseil de défense autour d'Emmanuel Macron.
Mais "nous en connaissons l'impact très lourd sur tous les plans" et "nous pouvons encore nous donner une chance d'éviter le confinement", a assuré Jean Castex, voulant "tout mettre en oeuvre pour éviter" ce troisième confinement qui semblait inéluctable ces derniers jours.
Le gouvernement a notamment décidé de fermer les frontières aux pays extérieurs à l'UE à partir de dimanche 00H00, "sauf motif impérieux", de fermer dès ce dimanche les centres commerciaux non-alimentaires de plus de 20.000 m2 et de renforcer les jauges de fréquentation dans toutes les grandes surfaces.
Ces annonces ont immédiatement été jugées trop faibles par certains élus de l'opposition. "Tout ça pour ça", ont déploré à l'unisson le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, et le chef de file des députés LR, Damien Abad.
- "Reculer pour moins bien sauter" -
"Je trouve particulièrement dangereux de jouer sur la corde psychologique des Français en faisant monter la menace du confinement ces derniers jours pour finalement envoyer à la volée un Premier ministre embarrassé faire des annonces mineures", a tweeté ce dernier.
Le choix de ne pas reconfiner, en tout cas pas de suite, interroge également la communauté médicale, alors que de nombreux experts sanitaires plaidaient pour une décision plus radicale face à la propagation du variant anglais plus contagieux, qui représenterait désormais 10% des cas en France.
"Les mesures sur le plan sanitaire sont quasi anecdotiques", a déploré samedi sur BFMTV le Pr Gilbert Deray, chef du service de néphrologie à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière. "Ce n'est pas reculer pour mieux sauter, c'est reculer pour moins bien sauter: plus vous reculez, plus ça monte --et ça va monter--, et plus ça va être dur, plus ça va être long", a-t-il ajouté.
"C'est une stratégie équilibrée", a tempéré sur la même chaîne Frédéric Adnet, chef des urgences de l'hôpital Avicenne de Bobigny.
"Actuellement l'hôpital se remplit petit à petit mais ce n'est pas une augmentation exponentielle", a-t-il ajouté.
La pression sur le système de santé est élevée avec 27.270 malades du Covid-19 hospitalisés, pas loin des pics de la première et de la deuxième vagues (32.000 et 33.000).
Parmi eux, 3.120 patients se trouvaient en réanimation vendredi, en-dessous des pics des précédentes vagues (4.900 à l'automne, 7.000 au printemps). Et le rythme des décès ne décroit pas, avec 356 décès à l'hôpital vendredi, portant à 75.620 le bilan total depuis le début de l'épidémie.
- Confiner pendant les vacances ? -
Face à cette augmentation lente mais continue, le gouvernement s'est donné quelques jours supplémentaires, sans fixer de date, mais pour certains médecins, un reconfinement est toujours inexorable.
"On voit bien qu'il y a une volonté d'attendre, probablement pour faire concorder une décision de restrictions supplémentaires avec les vacances de février", qui commencent le 6 février pour la zone A, a commenté sur LCI Bruno Megarbane, chef du service de réanimation médicale et toxicologique de l'hôpital Lariboisière à Paris.
"Ça va être un confinement d'au moins un mois, donc il faut peser la nécessité", a-t-il ajouté.
Les annonces du gouvernement ont toutefois fait des heureux, notamment chez les petits commerçants qui ne vont pas rejoindre pour l'instant les débits de boissons, restaurants et lieux culturels fermés depuis fin octobre.
Le gouvernement, "en conciliant exigences sanitaires et économiques, tire les leçons des premiers confinements. Des mesures de freinage plutôt qu'un confinement trop dur qui aurait provoqué un effondrement de l'économie", a de son côté réagi sur Twitter le président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux.
Pour préciser ces nouvelles règles, les acteurs de la grande distribution et du commerce doivent s'entretenir samedi avec le ministre de l'Economie Bruno Le Maire. AFP