Plusieurs dizaines de milliers de personnes ont défilé samedi pour la troisième semaine consécutive en France, sans incidents majeurs, pour dénoncer la très controversée proposition de loi
Sécurité globale, à leurs yeux "liberticide", et le projet de loi du gouvernement sur le séparatisme.
Lancée par un collectif de syndicats, d'associations ou de mouvements de gauche, cette nouvelle journée de mobilisation s'est déroulée sous forte présence policière, notamment à Paris, pour éviter la répétition des incidents violents des précédents rassemblements.
Ces manifestations ont réuni quelque 60.000 personnes dans tout le pays, selon les organisateurs, 26.417 selon le ministère de l'Intérieur.
Dans la capitale, de nombreuses unités de CRS et de gendarmes mobiles ont encadré au plus près les manifestants - 10.000 selon les organisateurs, 5.000 pour le ministère - qui ont défilé de la place du Châtelet à celle de la République, et procédé à près de 150 interpellations.
Ces nombreuses arrestations ont suscité des tensions et les forces de l'ordre ont brièvement utilisé des canons à eau pour disperser le cortège à la nuit tombée place de la République, ont constaté des journalistes de l'AFP. Mais aucun incident majeur n'y a été signalé.
"Force est restée à la loi", s'est réjoui sur Twitter le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, pour qui "la stratégie de fermeté anti-casseurs () a permis de les empêcher" de commettre des violences.
- "Surnombre et mobilités" -
Selon une source syndicale, 3.000 policiers et gendarmes ont été mobilisés pour le défilé parisien, soit environ 50% de plus que la semaine dernière où de violents incidents les avaient opposées à des petits groupes de manifestants "ultras".
"Il était temps qu'on comprenne qu'il fallait le surnombre et la mobilité pour déstabiliser les black blocs", a réagi auprès de l'AFP le délégué général du syndicat Alliance, Frédéric Lagache.
Réunis derrière une banderole proclamant "stop aux lois liberticides, stop islamophobie", les manifestants parisiens ont autant dénoncé les textes du gouvernement que les violences policières.
"On ne peut pas rester chez soi face à ce qui se passe actuellement dans le pays, et qui est grave. Le gouvernement () réduit nos libertés texte après texte", a indiqué à l'AFP Christophe, un professeur de philosophie de l'art de 47 ans.
Adoptée par les députés, la proposition de loi Sécurité globale suscite depuis des semaines de vives critiques de la part de la gauche, des journalistes et des ONG de défense des libertés, notamment son article 24 qui pénalise la diffusion malveillante d'images des forces de l'ordre.
Le texte est accusé de porter atteinte aux libertés de la presse, d'expression et de manifester, des critiques renforcées par le passage à tabac filmé du producteur de musique Michel Zecler par des policiers, le 21 novembre.
Ces deux dernières semaines, des dizaines de milliers de personnes ont défilé pour en exiger le retrait.
- "Trop de restrictions" -
Ce samedi encore, ils étaient environ 2.000 à Lyon, 1.800 à Montpellier, entre 1.000 et 1.500 à Strasbourg, 500 à Lille ou à Bordeaux et 1.200 à Toulouse et un millier à Marseille, selon les autorités locales.
"Je ne proteste pas uniquement contre la loi de sécurité globale", a expliqué une étudiante montpelliéraine de 23 ans, Coline Marguet, "nous allons vers trop de restrictions, de manière générale".
"Les gouvernants profitent de la crise du Covid pour réduire les libertés", a renchéri un manifestant marseillais, Hervé Larue.
Face au tollé provoqué par l'article 24, le gouvernement a finalement laissé au parlement le soin de trouver une nouvelle formulation alors que la proposition de loi Sécurité globale doit passer devant le Sénat en janvier.
Le nouveau projet de loi contre le séparatisme a lui été présenté mercredi en conseil des ministres. Dénoncé par certains à gauche comme une loi de "stigmatisation des musulmans", il vise selon le gouvernement à renforcer la lutte contre l'islamisme radical, dans la foulée de l'attentat jihadiste qui a tué Samuel Paty.