La France n'en est qu'au "début de la crise" et le confinement de la population pourrait être prolongé, ont averti vendredi les autorités, avant la réunion par Emmanuel Macron d'un conseil de
défense au quatrième jour d'un confinement jugé insuffisamment respecté, et alors que certains secteurs sont encouragés à poursuivre leurs activités.
"C'est une course de vitesse engagée avec le virus, mais alors même que nous sommes au début, nous avons besoin de garder beaucoup de réactivité", a souligné le président Emmanuel Macron lors d'une visite à la Cellule interministérielle de crise, au sous-sol du ministère de l'Intérieur.
Il "est assez probable que nous soyons obligés de prolonger le confinement" au delà de deux semaines, a expliqué la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye sur BFMTV et RMC. Mais la mise en place d'un couvre feu n'est "pour l'instant pas envisagée", a-t-elle dit.
Prolonger, pour combien de temps? "Ça dépendra un peu de la courbe de l'épidémie (...) mais on peut penser que ça va être plus que 15 jours, ça sera autour de six semaines, voire plus", a pronostiqué le docteur Yazdan Yazdanpanah, directeur de l'infectiologie à l'Inserm.
Le confinement pourra cesser "quand le virus ne circulera plus", a de son côté insisté dans Le Figaro Olivier Véran, le ministre de la Santé, en estimant le nombre de malades actuels en France à 20.000.
Car les Français semblent avoir du mal à prendre conscience de la réalité et accepter ce confinement strict. En visite jeudi à l'Institut Pasteur à Paris, Emmanuel Macron a regretté qu'ils prennent "à la légère" les consignes et continuent de traîner dehors, profitant du beau temps.
Cent mille membres des forces de l'ordre ont été déployés, infligeant une amende forfaitaire de 135 euros en cas de "violation des interdictions de se déplacer hors de son domicile".
Les autorités veulent resserrer les boulons, et pour la première fois des personnes déjà verbalisées pour sorties non-justifiées ont été placées en garde à vue pour "mise en danger de la vie d'autrui", dans le Pas-de-Calais et en Seine-Saint-Denis.
Après Paris, qui a fermé tous ses espaces verts, la ville de Lille a annoncé vendredi la fermeture du parc de la Citadelle, son principal espace vert, après des "abus". Et à Nice, l'emblématique Promenade des Anglais a été fermée, alors qu'un drone muni d'un haut-parleur surveille le bord de mer.
Et la présidente de la région Ile-de-France Valérie Pécresse a demandé que les policiers municipaux puissent eux aussi verbaliser ceux qui ne respectent pas les consignes de confinement.
- "Rapide et intense" -
"Plus nous serons mobilisés, plus nous casserons vite la courbe épidémique, c'est un combat collectif", avait insisté jeudi le Pr Salomon, directeur général de la Santé (DGS), en annonçant 372 décès comptabilisés depuis le début de l'épidémie (108 supplémentaires en 24 heures) et 4.761 hospitalisations.
Depuis mercredi soir, 91 cas lourds ont rejoint les services de réanimation, portant leur total à 1.122. "Les cas de contamination doublent tous les quatre jours", a averti le DGS.
Dans un communiqué au chef de l'Etat, l'Intersyndicale nationale des internes a appelé les autorités à "cesser les demi-mesures et les discours équivoques" et réclamé un "confinement total et absolu de l'ensemble de la population". Autrement, "nous devrons faire des choix", préviennent-ils.
Les préfets ont haussé le ton jeudi et fermé les plages de tout l'arc méditerranéen, de la Corse - où un navire de la marine nationale évacuera ce weekend des patients atteints du Covid - et de nombreux départements de la façade atlantique.
Les restrictions pèsent également lourd dans les prisons, où les visites ont été suspendues.
- "Difficultés logistiques" -
Désormais 157 établissements de référence accueillent des malades du coronavirus.
Dans la région de Mulhouse, l'un des foyers majeurs du virus en France, "le déploiement d'un hôpital militaire se met en place et pourra accueillir des malades lourds dans les tous prochains jours", a assuré le Pr Salomon.
- "Difficultés logistiques" -
Désormais 157 établissements de référence accueillent des malades du coronavirus.
Dans la région de Mulhouse, l'un des foyers majeurs du virus en France, "le déploiement d'un hôpital militaire se met en place et pourra accueillir des malades lourds dans les tous prochains jours", a assuré le Pr Salomon.
Le gouvernement a reconnu des "difficultés logistiques" dans la fourniture de masques, alloués "en priorité aux soignants", qui s'alarment pourtant de leur dénuement.
Outre le déstockage de 5 millions de masques chirurgicaux des Armées, 25 millions de masques sont en cours de livraison aux pharmacies et établissements de soins.
Ces équipements sont "réservés aux professionnels de santé", a rappelé jeudi le DGS.
Cependant, de nombreuses professions en contact avec le public en réclament aussi, comme les policiers, les pompiers, les livreurs, les éboueurs ou les professionnels du bâtiment.
- "Etat d'urgence" -
Après l'Assemblée, le Sénat a adopté en première lecture le projet de loi permettant l'instauration d'un état d'urgence sanitaire, accompagné de mesures pour soutenir l'économie, qui devrait être frappée de plein fouet, avec un recul anticipé de 1% du PIB en 2020 et un déficit public de 3,9 %.
Les deux textes doivent maintenant faire la navette entre les deux chambres, dans l'objectif d'une adoption définitive avant la fin de la semaine.
Le gouvernement a décidé in extremis de reporter les réunions de conseils municipaux élus au premier tour, prévues de vendredi à dimanche pour désigner les maires.
Mais il insiste pour que certaines activités économiques se poursuivent, en dépit des craintes de salariés ou de professionnels dans certains secteurs, comme chez Amazon ou dans le bâtiment.
Le ministre de l'Economie Bruno Le Marie a appelé les entreprises à verser une prime défiscalisée à leurs salariés, notamment à ceux qui "ont eu le courage de se rendre sur leur lieu de travail" dans les secteur essentiels (alimentation, transports...). Il a également calmé le ton avec le secteur du bâtiment sur la nécessité ou non d'interrompre les chantiers.
La France doit aussi organiser le retour d'environ 130.000 ressortissants bloqués à l'étranger, en général pour des vacances.afp, photo - Remi Jouan, Wikimedia.