Le budget français de 2024 marque une nouvelle ère

 

Une dette publique croissante, une inflation persistante, des taux d'intérêt en hausse et une croissance molle : tous les indicateurs de l'économie française sont dans le

rouge. Le pays n'est plus en mesure de faire de grandes promesses, et il est temps pour les dirigeants politiques de prendre conscience de cette réalité.

Le projet de loi de finances 2024 de la France, présenté au Conseil des ministres le mercredi 27 septembre, en même temps que le projet de loi de financement de la sécurité sociale, devra résoudre une équation budgétaire particulièrement difficile. La dette publique croissante, l'inflation persistante, les taux d'intérêt en hausse et la croissance molle : en l'espace de quelques mois, tous les indicateurs de l'économie française sont passés dans le rouge, laissant au gouvernement très peu de marge de manœuvre pour équilibrer des recettes en baisse et des dépenses hors de contrôle.

Le nouveau ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave, s'est fixé trois priorités : investir massivement dans la transition environnementale, renforcer les services publics qui contribuent à la cohésion sociale et réduire le déficit public pour financer les investissements prioritaires. En d'autres termes, essayer de résoudre une équation difficile.

La difficulté persistera bien au-delà de 2024, car le gouvernement tente également de faire adopter une loi sur la planification des finances publiques, qui établira un plan budgétaire jusqu'en 2027. Bien que son adoption soit une condition préalable pour accéder aux fonds de relance européens, à la fin de 2022, le projet de loi n'avait toujours pas obtenu la majorité. La nouvelle version, actuellement examinée par l'Assemblée nationale et légèrement plus contraignante que la précédente, ne devrait pas bénéficier d'un soutien plus large de l'opposition que la dernière version. Le gouvernement devra probablement avoir recours à l'article 49.3 (une disposition légale qui permet au gouvernement de faire adopter une loi sans vote) – le premier d'une série à utiliser sur les lois de finances.

Cela révèle la position délicate de la France par rapport à ses partenaires européens : en prévoyant de réduire son déficit public à moins de 3 % d'ici 2027, la France sera le dernier État membre à le faire. Elle s'engage sur cette voie sans consensus politique et sans garantie de succès. Réussir à réaliser des économies annuelles de 12 milliards d'euros et à stabiliser les dépenses publiques globales, comme l'a annoncé le gouvernement, est une tâche difficile. Cela pourrait même ne pas suffire : aux yeux du Haut Conseil des finances publiques, cette nouvelle version "manque toujours de crédibilité".

Un fardeau pour l'avenir Après des années d'approche du "quoi qu'il en coûte" et de taux d'intérêt historiquement bas, le changement d'ère est brutal. Il est temps que tous les dirigeants politiques en prennent enfin conscience. Les 3 000 milliards d'euros de dette accumulés au cours des dernières décennies sont un boulet pour notre pays, quelle que soit l'orientation politique de ceux qui sont au pouvoir. Rembourser cette dette pèsera un peu plus lourdement sur le budget chaque année. En raison de la hausse des taux d'intérêt, le fardeau de la dette explose. D'ici 2027, il aura doublé pour dépasser les 80 milliards d'euros, ce qui en fera le poste budgétaire le plus important devant l'éducation.

En conséquence, le pays n'est plus en mesure de faire de grandes promesses : baisse des impôts (comme le demande Marine Le Pen), augmentation des dépenses (comme le réclame la gauche) ou réductions massives d'impôts (comme le demande la droite). Le gouvernement, lui aussi, se retrouve affaibli par sa promesse de ne pas augmenter les impôts coûte que coûte, alors qu'une pile d'investissements dans la transition environnementale, la santé, l'éducation et la défense reste à financer. Pour trouver un moyen de surmonter tout cela, chacun devra reconsidérer ce qu'il tient pour acquis et abandonner des positions politiques qui sont bien éloignées de la réalité des finances du pays. Foto-Matpate, Wikimedia commons.